Vive les années 70 ! Loin des graciles et sophistiqués prototypes des années 60, place aux 911 sous anabolisants avec ce plateau de brutes épaisses du Porsche Rennsport Reunion V : celui des infernales 935 groupe 5, 934 groupe 4 et autres 911 RSR en colère.
Au sortir de l’ère de la 917, Porsche change radicalement son approche sportive : Les années Sport Proto ont certes permis d’assoir le nom de Porsche au firmament de la compétition, mais d’un autre côté elles ont failli couler la marque. Ferdinand Piech est écarté par son oncle Ferry Porsche et dédiera sa vie à bâtir le géant Audi-Volkswagen, hanté par son arbre généalogique, mais ça, c’est une autre histoire.
A la tête du service compétition, on décide qu’il faut faire preuve de plus de rigueur financière et, surtout, se rapprocher de la série pour que les clients Porsche puissent sentir la filiation avec la sportive qui dort dans le garage. Gagner le dimanche, vendre le lundi. La décennie à venir sera donc profondément axée sur la brave 911, une auto en fin de carrière qu’il faudra songer un jour à remplacer… ou pas.
RSR : Rennsport, mais Renn
Commençons par les 911 RSR. Atmosphériques, elles dérivent de la célébrissime Carrera 2.7 RS. Leurs cylindrées sont augmentées par rapport à la série, à 2.8L ou 3.0L.
Voici une 2.8 RSR de 1972.
Millésime 1973 pour cette autre 2.8 RSR. Elle reprend les célèbres couleurs Sunoco du Team Penske, juste pour l’hommage.
Avec la 3.0 RSR, les mignons petits ducktails laissent la place aux pelles à tarte et les ailes s’élargissent sérieusement. Une participation aux 24 Heures du Mans 1977 et des apparitions à Sebring jusqu’en 1984 pour cette 3.0 RSR de 1973.
Voici un groupe de quatre 911 3.0 RSR de 1974 avec des couleurs très seventies, un joli camaïeu de vert et une touche d’orange.
L’élargissement des caisses est conséquent par rapport à une simple Carrera.
L’armada des 3.0 RSR continue avec des millésimes 1975. Sous les couleurs du concessionnaire floridien Brumos ,celle-ci a terminé les 24 Heures de Daytona 1976 en 3ème position aux mains de Hurley Haywood et Jim Busby.
David Donohue, le fils du regretté Mark, est au volant d’une 3.0 RSR du team Interscope Racing.
Avec la numéro 75 et la numéro 101, ces 3 voitures se suivent dans la chaîne de production avec 3 numéros de série consécutifs, et la numéro 61A les suit avec 1 numéro d’écart.
Cette dernière 3.0 RSR Kremer a pour pilote du weekend rien de moins que le grand Jürgen Barth.
Groupe 4
En 1974, l’usine Porsche lance en compétition la première voiture de course suralimentée par turbocompresseur de l’histoire, la 911 Carrera RSR Turbo. L’expérience s’avère concluante avec une 2ème place au Mans, et en 1975, la première 911 Turbo routière fait son entrée sur le marché : C’est le type 930. D’emblée, la version de série (260 ch) est prévue pour les nouveaux règlements GT internationaux qui entreront en vigueur en 1976 : le Groupe 4 et le Groupe 5. La boîte de vitesse de la 930 de route, qui doit rester strictement de série sur les dérivés de compétition, est calibrée pour encaisser les puissances titanesques qu’atteindront bientôt les 935 (plus de 800 ch…).
Pour le Groupe 4, la 934 développe 480 ch et est disponible dans toutes les bonnes crèmeries à l’orée de la saison 1976.
Cet exemplaire est une 934 Kremer. Son palmarès est intéressant puisqu’elle remporte la catégorie GT au Mans 1977 sous ces couleurs avec le regretté Bob Wollek.
Cette voiture arbore un « kolossal » aileron de 935 mais c’est bel et bien une 934 année-modèle 1976.
Cette mutation aérodynamique offre une transition parfaite pour aborder l’une des espèces de course les plus rares et méconnues de la galaxie Porsche : La 934/5 de 1977. Ou comme le disent nos amis du pays de l’oncle Sam, la 934 ½, ce qui résume parfaitement la bête : A mi-chemin entre une 934 et une 935. Dix voitures revendiquent ce statut, pas une de plus. Neuf d’entre elles ont pris le chemin des USA dès leur sortie d’usine et c’est un peu normal car elles ont été construites pour cela. Accordées uniquement à des clients très fidèles et très désireux de tout écraser dans les championnats Trans Am et IMSA GTO en 1977, ces 934 mutantes disposent d’un certain nombre de modifications issues de la 935 de Groupe 5. Le turbo souffle plus fort dans les bronches du flat 6, l’échangeur air-eau de la 935 est installé. La puissance passe à 590 ch, avec la progressivité d’un bâton de dynamite. Esthétiquement, la 934/5 fait encore plus de gonflette avec son aileron de 935 et ses hanches maxi-larges. A peine créée, la 934/5 est bannie par l’IMSA avant d’avoir eu l’occasion d’y rouler, il ne reste donc plus d’autre choix que de la faire courir là où on veut bien l’accueillir, en Trans Am. Avec succès évidemment puisque le suspense du championnat se résumera à savoir lequel des clients privilégiés de Stuttgart vaincra ses congénères, à coups d’évolutions plus ou moins prohibées.
Cette 934/5 est la dernière produite des dix exemplaires. Elle nous présente l’exacte spécification 934/5. Transformée par la suite en 935 à part entière puis surévoluée en K3 telle un pokémon, elle a été restaurée à l’origine pour notre plus grand plaisir. Si c’est pas du brutal !
Voici le huitième exemplaire et la fameuse lauréate finale du Trans Am 1977 sur exclusion de Brumos pour pontons illégaux. Elle est convertie en 935 en 1978 puis « rétrogradée » en vulgaire 934 en 1983. Par la suite elle a été restaurée aux spécifications 934/5 mais avec l’ajout des pontons arrière ultra-larges de 935. Les mêmes qui ont provoqué l’exclusion de la Brumos à l’époque…. Provocation quand tu nous tiens.
C’est large comme un monster truck, ça crache des flammes, en résumé c’est distingué.
Voici enfin une autre authentique 934/5… enfin ce qu’il en reste puisqu’elle a elle aussi subi en 1978 les transformations pour en faire ce qu’elle est actuellement, une 935.
Groupe 5
L’usine Porsche se lance en Groupe 5 en 1976 avec la 935. Cette catégorie dite « silhouette » donne de grandes latitudes de modification par rapport à la base de série. Notamment, les ailes peuvent être modifiées ce qui inspire à l’ingénieur Norbert Singer l’idée du « slant nose » : Les phares de la 911 font partie des ailes, non ? On peut donc les relocaliser ailleurs pour peaufiner l’aéro.
Les équipes privées n’ont accès à la machine de destruction massive que pour la saison 1977 avec la mise à disposition de la version client 935/77A.
La n°0A est une 935/77A utilisée entre 1978 et 1980 par le team Interscope Racing. Elle signe la pole position à Daytona en 1978.
Comme on l’a vu précédemment, la parenté technique 934-934/5-935 a conduit à un intense mélange des genres, de nombreuses équipes faisant évoluer leurs 934 en 935, ou modifiant allègrement leurs 935 vers des versions améliorées dont la plus populaire est la terrible K3 des frères Kremer. On peut donc trouver des châssis ayant muté plusieurs fois.
La 935 K3 n°0T semble avoir été entièrement assemblée chez Kremer en 1980. Avec le team Interscope Racing, elle signe une 3ème place aux 24H de Daytona en 1980.
Sa sœur n°00 de 1980 serait également une construction Kremer. Elle a été utilisée en 1981/82 par Interscope. Elle est conduite assez spectaculairement.
Patrick Long s’amuse aussi dans ce plateau au volant de cette 935/84 construite en 1983 par l’officine américaine Fabcar. Cette voiture a couru jusqu’en 1986.
La n°7 est un châssis Joest 1978 ayant couru 1979 à 1981 dans le championnat allemand DRM.
Attention derrière, c’est réglé un peu riche.
Cette 935 est la dernière ayant été construite par l’usine Porsche. Livrée à Bruce Canepa en 1979, elle a couru 5 courses seulement avant d’être retirée du service en 1981. Canepa la possède toujours et la conduit dans certains évènements historiques comme ce Rennsport. Selon lui, il s’agirait de la 935 la plus authentique qui soit parvenue jusqu’à nos jours.
Cette K3 est à l’origine une 934 de 1976, ayant reçu la conversion en 935 K3 en 1980. Elle remporte les 1000 km de Suzuka en 1981 aux mains des français Bob Wollek et Henri Pescarolo. Elle est présentée dans sa livrée du Mans 1980 où apparemment elle marchait bien puisque Rolf Stommelen l’a qualifiée 3ème sur la grille.
La K3 #70 est à la base une 935/77A de 1978 convertie en K3 en 1980. Elle remporte des victoires à Mid-Ohio en 1978, Watkins Glen en 1979 et Road Atlanta en 1980 avec les Frères Whittington.
Cette 935/79 n’a qu’une seule course à son actif : Les 24 Heures du Mans 1980 avec un abandon.
Historique inconnu pour celle-ci, mais ça sent la construction privée.
Cette dernière K3 est un vrai Transformers : Née sous l’identité d’une 934 en 1976, elle passe tous les échelons de la violence : 934/5 en 1978 puis 935 en 1979, et enfin K3 en 1981.
Les autres…
N’oublions pas ces 911 IMSA GTO.
Ni cette 911 IROC pilotée par Marco Seefried, le coéquipier de Patrick Dempsey et Patrick Long en FIA WEC en 2015.
Honneur aux petits, à ceux qui ont dû surveiller leurs rétroviseurs comme le lait sur le feu. Avec des simples 911 de série, on ne doit pas bien faire le malin quand déboule une meute de K3 qui lancent des flammes.
Ces deux Carrera datent de 1974, la troisième de 1975 et la quatrième est une RS 3.0 de 1974.
Curiosité, une 914/4 de 1970 aussi esseulée que bodybuildée.
Deux 924 en course également: une GTR « Holbert » de 1980 et une Carrera GTS de 1981.
La course est remportée sur le fil et au prix de certaines prises de risques par Charles Nearburg sur sa 935 K3 numéro 70, devant le pilote d’usine Porsche Patrick Long au volant de la 935 numéro 5 et Fred Kaimer sur une autre K3, la 0T.