Bernard Richards, fondateur de B.R.M. Chronographes, nous a accordé un entretien exclusif en début de salon. Présente depuis 10 ans au Mondial de l’Auto, la marque horlogère française est appréciée des passionnés de sport auto et des professionnels du milieu avec qui elle a noué des relations de confiance. La preuve ? Ligier Sportscars a dévoilé le 11 octobre dernier sa nouvelle GT dédiée au circuit sur le stand B.R.M !
AutomotivPress : Bonjour Bernard, comment se porte B.R.M (Bernard Richards Manufacture) en France ?
Bernard Richards : Le marché français n’est pas un marché qui se développe actuellement. La baisse des ventes touche toutes les manufactures horlogères. B.R.M a la chance d’avoir une taille qui lui permet de s’adapter rapidement aux évolutions du marché (la marque produit aujourd’hui 7 à 8 montres par jour). Il est plus facile de manœuvrer un hors-bord qu’un porte avions ! Aujourd’hui, il faut être très proches des gens et participer à beaucoup d’événements. B.R.M va ainsi développer la personnalisation pour répondre à la demande des clients. Nous avons été les premiers à offrir la possibilité aux clients de personnaliser sa montre en ligne grâce à un configurateur horloger sur notre site internet. L’idée est d’avoir dans le futur une personnalisation encore plus poussée pour proposer des produits uniques. Notre prochain objectif : vendre en ligne.
AP : Quelles différences y aura t-il par rapport au configurateur actuel ?
BR : Le nouveau configurateur proposera plus de modèles configurables et plus de possibilités de personnalisation. Comme pour une voiture, le client aura le choix entre plusieurs options. Il pourra configurer sa montre dans les moindres détails : les matériaux du boîtier (carbone, titane, acier), la gravure de son nom sur le fond en choisissant la police de caractère et la couleur, le logo sur la couronne, les couleurs sur le cadran et les aiguilles, etc. Le but est de pouvoir créer une montre vraiment unique. B.R.M peut le faire car nous produisons pratiquement tous les composants en interne jusqu’aux vis. Et nos machines configurables permettent de fabriquer à l’unité.
Les montres liées à l’automobile
AP : Quelles sont les modèles qui se vendent le mieux ?
BR : Les modèles historiques V12 et V6 restent toujours en tête des ventes. Le modèle DDF [dévoilé en 2016] est un vrai succès. Depuis six mois, nous sommes en rupture de stock. En fait, il faut plus de temps pour produire une DDF. La durée d’usinage du boîtier est de 2h30 contre 1h30 pour celui d’une V12, ce qui ne permet de produire que deux montres par jour. Les modèles hybrides quant à eux ont été arrêtés car le stock de mouvements est épuisé.
AP : Le partenariat avec Gulf Racing s’est terminé l’année dernière. Quel bilan en tirez-vous ?
BR : Le partenariat avec Gulf Racing a duré huit ans. Il a débuté à Rétromobile 2010 sur le stand Gulf. Tous nos modèles de montres ont été déclinés aux célèbres couleurs bleu ciel et orange et ce partenariat a eu beaucoup de succès. On avait un peu fait le tour du partenariat. Quand on a signé avec Martini Racing [en 2017], je me suis dit qu’on ne pouvait pas être partenaire en même temps des deux plus grands sponsors du sport automobile. J’ai eu de la chance, on a été en F1, en endurance, en Indy500, avec plusieurs constructeurs auto. On a été partenaire de Gulf Racing et maintenant de Martini Racing. Jamais je n’aurais pensé cela possible en créant B.R.M il y a seulement 15 ans.
AP : Vous vous êtes effectivement associé l’année dernière avec le célèbre sponsor italien Martini Racing.
BR : Aujourd’hui, on propose cinq modèles aux couleurs de Martini Racing. On a aussi lancé une série limitée de 15 coffrets comprenant deux V12 Martini, ils ont tous été vendus en une heure. Ce sont aujourd’hui des collectors. On va refaire prochainement une deuxième série de 15 coffrets de montres en titane. Le partenariat avec Martini Racing est très fort et très important pour nous. C’est un nom mythique en sport automobile qui m’a fait rêver pendant toute ma jeunesse, notamment avec les Lancia de rallye.
AP : Vous êtes partenaire de DS Automobiles depuis 2016. Que vous apporte ce partenariat ?
BR : Pour B.R.M, c’est un partenariat fabuleux et une belle vitrine pour nos montres. DS Automobiles connait un beau succès et la DS 7 Crossback fait un malheur.
AP : Je suis justement monté dans une DS 7 Crossback et au milieu de tableau de bord trônait une horloge de bord B.R.M. C’est une montre mécanique ?
BR : Non, elle est électrique. On a longtemps discuté avec le staff de DS quand on a signé le partenariat car je voulais que l’horloge de bord B.R.M ne soit montée en série qu’à partir d’un certain niveau de gamme [au-dessus de 40.000 €]. Mais elle reste disponible en option sur les niveaux de finition inférieurs.
AP : Est ce qu’il y aura d’autres séries limitées comme la DS 3 Performance “B.R.M Chronographes Édition” ?
BR : Il y a eu cette petite série de 39 voitures mais il n’est pas prévu de faire une nouvelle série spéciale “B.R.M” pour le moment.
AP : Vous aviez également conçu une montre spéciale pour le concept-car DS E-Tense en 2016. Allez-vous renouveler l’expérience ?
BR : Cette année, on a réalisé l’horloge de bord du dernier concept-car DS X E-Tense, un proto électrique asymétrique présenté en juillet dernier à Villacoublay. En fait, il y a deux horloges : une qui pivote devant le copilote et l’autre, fixe, devant le pilote.
AP : Depuis quelques mois, j’ai l’impression que la marque délaisse l’automobile pour le golf. Pourquoi s’être investi dans golf ?
BR : Nous n’y sommes pas arrivés par hasard. Ce sont des concessionnaires Porsche qui nous ont demandé de les accompagner sur des compétitions de golf. Puis BMW nous a sollicité il y a deux ans pour être partenaire de la BMW Golf Cup. En 2017, nous avons créé une collection de montres pour les golfeurs qui ont une haute résistance aux chocs grâce à notre système unique composé d’une masse autobloquante et d’amortisseurs. Lorsqu’il s’agit de la collection “golf”, dans la majorité des cas, nous vendons deux montres en même temps, une pour le mari et une autre pour son épouse !
AP : Vous êtes la seule manufacture horlogère présente au Mondial avec son propre stand. Comment avez-vous imposé B.R.M au milieu de tous les constructeurs automobiles ?
BR : Cela fait 10 ans que B.R.M est présente sur le salon. Quand on a commencé, les organisateurs ne voulaient d’horlogers. Comme à l’époque j’avais une Norma M20, j’ai pris un stand au nom de Norma-BRM et j’y ai mis ma voiture pour pouvoir exposer mes montres. On était sous un petit chapiteau de 25 m² à l’écart, au fond d’un hall. Aujourd’hui, on est dans le hall 1 en face de Ferrari ! C’est une consécration pour nous et je ne remercierai jamais assez les organisateurs. On expose de belles voitures, une Lotus Exige car nous sommes partenaire de la Lotus Cup Europe et une Ligier P4. Le patron de Ligier a été un de mes premiers clients. Il nous a choisi pour faire la présentation de sa nouvelle GT, la Ligier JS2 R.
AP : Quelle est la proportion de montres précieuses dans les ventes annuelles ?
BR : On a de la demande. Mais ça représente un investissement trop important car il y a beaucoup de perte de matière. Il faudrait faire une grande série pour être rentable. Donc ce n’est pas intéressant pour nous. On en a vendu beaucoup mais je pense que je vais en arrêter la production.
AP : Songez-vous à nouer de nouveaux partenariats dans le secteur automobile ?
BR : On travaille déjà avec 11 constructeurs, Corvette, Lotus, DS, Mitsubishi, Nissan… On ne cherche pas forcément de partenariats supplémentaires avec des constructeurs, mais plutôt avec des circuits [B.R.M est déjà associée aux circuits du Val de Vienne, de La Ferté Gaucher, le Clark International Speedway, la Piste Fontenay Pôle]. On ne peut pas travailler avec tout le monde !
AP : Quelles seront les prochaines évolutions ou les prochains modèles ?
BR : Côté fabrication, on travaille sur deux nouvelles complications sur bases Valjoux et ETA. Ce sera quelque chose de différent par rapport à ce que proposent les autres manufactures mais je ne peux pas en dire plus pour l’instant. Elles seront proposées dès 2019 dans le nouveau configurateur. L’option “affichage 24 heures” sera proposée sur tous les modèles. On va présenter une V12-44 avec boîtier en carbone. Il y a 16 ans, B.R.M proposait déjà une V16-46 avec boîtier, couronne et poussoirs en carbone. J’avais aussi réalisé par le passé des pendules en carbone pour Dunhill. Côté distribution, on souhaite proposer bientôt la vente en ligne.
Questions personnelles
AP : Quelles montres possédez-vous ou avez-vous possédé ?
BR : J’ai eu une Bulova Accutron quand j’avais 14 ans. C’était un cadeau de mon père, horloger. Je l’ai malheureusement perdue. C’était vraiment une bonne montre, elle fonctionnait avec un diapason. Il y a 30 ans, je me suis acheté une Zenith, El Primero à cadran noir. J’ai eu aussi deux Dunhill.
AP : Quelle est votre « Graal » horloger ?
BR : Je ne parlerai pas de montres mais plutôt pour ma marque. L’accomplissement serait pour moi qu’un passionné de sports mécaniques cite en premier B.R.M quand on lui parle de montres.
AP : Et votre « Graal » automobile ?
BR : Une Ligier JS P4 pour aller sur les circuits !
AP : Quelles autres passions que l’horlogerie avez-vous ?
BR : Les chevaux, la nature, la pêche.
Un grand merci Bernard Richards d’avoir répondu à nos questions.
Bravo pour cet article sur les montres B.R.M
Très belle réussite pour cette entreprise française.
Bravo à B.R.M Bernard Richards Manufacture.
Cedric