Après un salon de Genève où toutes les superstars mécaniques exhibaient leur plastique de rêve, j’ai récupéré auprès de Ford France la dernière Focus ST. Certes elle n’a pas le physique aussi déluré que sa future grande sœur la RS et est moins fantasmagorique que la GT, mais quand on y regarde de plus près, il pourrait bien s’agir de la compagne idéale pour faire un bout de chemin…
Marre du gris, du blanc et du noir ? Ford ose les couleurs spectaculaires sur sa compacte en tenue de sport. Tangerine Scream, c’est la dénomination officielle de l’orange flashy de notre modèle d’essai. Je veux bien croire que pour certain ce sera difficile à assumer, mais personnellement je trouve que cela rehausse les attributs sportifs de la Ford. Avec sa calandre noire aux faux airs d’Aston Martin, son béquet suggestif et ses grandes roues de 18 pouces laissant apparaître les étriers de freins peints en rouge, l’auto attire l’œil sans aucun doute. Et je dois bien reconnaitre que le physique plutôt quelconque de la Focus ne manque pas d’attrait dans cette configuration.
Côté habitacle, on ne fait pas non plus dans la discrétion. Les sièges reprennent la teinte de la carrosserie. A l’avant c’est Recaro qui équipe la ST. C’est bien marqué sur la joue du dossier. Si le dessin des baquets est attirant, à l’usage le confort n’est pas complètement au rendez-vous. C’est en particulier au niveau du torse que l’ergonomie aurait mérité d’être plus soignée. J’avoue être quelque peu enrobé, mais même une collègue plutôt menue a trouvé le siège étroit. Ceci dit, si la qualité d’assise ne vaut pas celle de la Peugeot 208 GTi 30th, on est tout de même mieux que dans l’Alfa Romeo Giulietta QV. Au bout de quelques minutes, on arrive finalement à se caler et trouver une position acceptable.
Tant qu’à évoquer tout de suite les défauts d’ergonomie, c’est ensuite à la colonne de direction que je m’en prendrais. Bien que réglable en hauteur, je n’ai pas réussi à bloquer le volant dans la position qui me paraissait la plus indiquée. Le verrouillage de la hauteur refusant de s’enclencher dans la position demandée. Au final j’ai dû me contenter d’un volant positionné un poil trop bas. Pas de quoi rendre la conduite inconfortable, mais le réglage idéal : pas moyen !
Une fois ces deux récriminations effectuées, plus grand-chose à critiquer cependant. Le volant en lui-même est agréable en main, autant pas la qualité de son cuir que par son épaisseur. Côté pédalier rien à redire non plus, tandis que le pommeau du levier de vitesse marie fort bien le métal et le cuir pour une préhension parfaite. Côté impression générale, la qualité perçue est bonne. Le plastique de la planche de bord conjugue une partie “moussée” sur le dessus et une partie en plastique dur sur la console centrale, mais ces deux matériaux respirent la solidité. En termes de design cette console centrale est assez intuitive à défaut d’être très originale. L’écran tactile multifonctions est bien lisible et le système SYNC2 de commande vocale permet de facilement effectuer les principaux réglages de confort sans avoir à quitter la route des yeux ou lâcher le volant. Radio ; navigation ; communication et même climatisation sont réglables par la parole et ce, avec une bonne qualité d’interaction homme-machine.
Le petit gadget sympa : les trois cadrans au centre de la console qui rajoutent la touche sport : pression et température d’huile (pour savoir à quel moment le moteur est prêt à se faire cravacher) et pression de turbo… pour le plaisir de voir l’aiguille s’envoler à chaque accélération.
En parlant du moteur, fini le 5 cylindres des premières Focus ST. Nous sommes ici en présence d’un 4 cylindres en ligne monté transversalement, cubant 2 litres et affublé d’un turbo Borg Wagner. Fort de 250 ch et 360 Nm il ne se situe pas sur le papier au top de la hiérarchie des grosses GTi, cependant à l’usage il faut preuve d’une belle santé et sait grogner avec entrain lorsqu’un le cravache. Beau travail sur l’échappement messieurs de chez Ford ! Entre sa vigueur réelle et le ressenti, il faut bien avouer qu’il ne semble jamais manquer de ressources.
Si la Focus n’a rien d’une ballerine avec 1437 kg annoncés à vide, le travail effectué par Ford Performance est remarquable sur la partie châssis.
Lors des premiers kilomètres, la ST apparaît tout de suite ferme mais pas inconfortable pour autant. Si un léger manque de ressenti peut à la limite lui être reproché, la consistance de la direction est globalement bonne. Très vite j’ai été séduit par la qualité du train avant qui semble soudé au sol. En augmentant le rythme, cette première impression se confirme, aucune amorce de sous virage ne vient gâcher le plaisir d’attaquer tout type de virage en allant mordre le point de corde exactement là où je ne décide.
Avec les kilomètres, cette confiance dans le train avant permet de passer de plus en plus vite. Et comme le train arrière suit le mouvement sans se faire remarquer, les vitesses de passage en courbe commencent à devenir intéressantes.
A ce stade, je commence à être un peu gêné par l’antipatinage. Ce dernier génère des à-coups brutaux lorsque je remets les gaz, principalement à basse vitesse en sortie d’épingle. Le plaisir en pâtit autant que l’efficacité. Heureusement d’une pichenette sur le bon bouton, on passe en mode sport avec antipatinage désactivé. La Focus reprend alors de sa superbe avec une motricité globalement bien contrôlée. Et quand, dans un élan d’enthousiasme incontrôlé, j’envoie un peu trop de watts, le train se met à cirer de façon plus naturelle que les rebonds générés par l’électronique.
Je peux alors pousser un peu plus la Ford dans ses retranchements et, alors que je craignais qu’elle n’abandonne la partie, la voici qui dévoile son véritable caractère. Jusqu’alors reine de la neutralité dans son comportement, la voici qui se met à jouer des hanches. Le train arrière décide que lui aussi à le droit de faire preuve de personnalité. Il démontre une belle aptitude à glisser au lever de pied pour remettre la voiture en ligne à la demande. Je peux alors entrer fort dans le virage, accélérer avant le point de corde, relâcher les gaz et profiter de cette mobilité de la poupe pour remettre la voiture en ligne et reprendre la trajectoire pour sortir comme une flèche, bien aidé par le moteur qui n’attendait que mon signal pour propulser ma monture jusqu’au prochain virage.
Côté efficacité pure, il est fort probable qu’une Renault Megane RS (pour ne citer qu’elle) soit un ton au-dessus. Cependant sur route ouverte la Renault ne saura être poussée à ses limites. La qualité principale de la Focus est que, sans sacrifier l’efficacité, elle sait gratifier son conducteur en se montrant à la fois joueuse et prévisible. Pour aller faire un tour sur circuit, ce n’est peut-être pas la monture idéale (trop lourde et pas assez extrême certainement), mais sur route elle permet de se faire plaisir à des vitesses raisonnables (notion il est vrai toute relative).
Rajouter à cela ses atouts pratiques (5 portes, coffre volumineux, équipement complet et moderne), elle mérite à ce jour le titre de sportive de père de famille idéale.
Pour reprendre le titre de l’article, le fantasme de la « girl next door » repose sur un principe simple : la voisine qu’il faut regarder avec attention pour découvrir ses charmes et qui, une fois remarquée s’avère être beaucoup plus excitante encore que ce qu’on imaginait. Juste pour rétablir l’égalité des genres, ça marche aussi avec le « boy next door »… La Ford Focus ST est le pendant automobile de ce fantasme. Jolie de prime abord sans remporter le concours de Miss Monde, elle se révèle une partenaire pleine de vie et de joie à qui on aimerait proposer de s’installer dans le garage. Une belle découverte qui laisse rêveur quant aux qualités qu’on attend de sa grande sœur, la Focus RS, qui sortira dans les mois à venir.