Parfois le ciel fait tout pour contrarier un essai. Avec une bête de 405 ch, qui plus est appartenant à un particulier, je dois avouer que j’aurais préféré autre chose qu’une pluie battante en ce dimanche frisquet. Mais contre mauvaise fortune bon cœur, je n’allais tout de même pas me priver de la présence sympathique de Rodolphe et de sa belle italienne.
Grande Touriste :
La Gran Turismo est encore au catalogue Maserati, après 11 ans déjà de bons et loyaux services envers la marque au trident. Une telle longévité est rare dans ce segment où l’attrait de la nouveauté l’emporte souvent sur bien d’autres considérations.
Comment expliquer cet âge canonique ? Peut-être par le fait que la Maserati réussit à cocher toutes les cases qui font les grandes GT : beauté, confort, performances et praticité ? C’est ce que nous allons tenter de découvrir dans des conditions bibliques.
Revue du style :
Onze ans et finalement très peu d’évolution esthétique. Il faut dire que la ligne signée Pininfarina est assez grandiose. C’est d’autant plus étonnant que la voiture est réellement immense. 4,88m de long, c’est 4 centimètres de plus qu’une BMW série 5 contemporaine. Pour un coupé ces dimensions sont relativement hors normes. Pourtant la Gran Turismo dégage une impression de finesse. La calandre au raz du bitume, les ailes rebondies autant à l’avant qu’à l’arrière, le long capot, l’ensemble réussit le pari d’évoquer les belles mécaniques des années 60 tout en restant d’une grande modernité.
Sur notre modèle du jour, l’agressivité naturelle de la ligne est atténuée par une teinte noire qui, ma foi, lui va plutôt bien. Moi qui suis plutôt adepte des couleurs voyantes d’habitude, je dois avouer que la Maserati porte bien sa robe discrète. Pas besoin d’en faire trop quand on a une classe naturelle…
A l’intérieur, c’est moins discret cependant. Cuir rouge à tous les étages ! Certains pourront trouver cela trop voyant, mais nous sommes dans une italienne, pas dans une allemande. Et de fait, je trouve que cette touche colorée n’est pas déplacée. D’autant plus que la voiture de Rodolphe reste dans un état impressionnant malgré ses dix ans. Il faut croire que de l’autre côté des Alpes, la qualité a plutôt bien progressé.
Petit tour en passager :
Avant de prendre le volant, je demande à Rodolphe de me faire une petite démonstration du mode d’emploi de la Gran Turismo. Déjà que dans des conditions faciles j’aurais été assez intimidé, je préfère voir un peu ce que la belle a dans le ventre. Première constatation, la Maserati n’est pas une brute épaisse. Elle s’accommode très bien d’une conduite souple et tranquille, même dans les embouteillages. La boite automatique se fait vite oublier, de même que le V8 4,2L dont le glouglou berce vos tympans avec douceur et délicatesse. Dans ces conditions, la motricité n’est jamais un problème et je me dis que finalement, cette Maserati est peut-être plus adaptée à un usage familial que, par exemple, une Mercedes C63s AMG qui, dans de semblables conditions, ruait brutalement à chaque coup d’accélérateur.
La promenade se poursuit dans la campagne yvelinoise avec sérénité. Seul le gabarit de l’auto est parfois un peu limitant lorsque l’on arrive sur les petites routes habituelles de mes essais. En contrepartie le confort est royal, tant à l’avant qu’à l’arrière où se lovent notre amie Molida et mon fils Timothé. Il faut avouer cependant qu’il s’agit là de deux petits gabarits. Inverser les places avec Rodolphe et moi à l’arrière, ce serait certainement une autre histoire…
Cependant la Gran Turismo réussit haut la main son test de confort et de praticité.
Au volant :
Rodolphe est du genre confiant. Alors que la pluie continue à marteler le tarmac, il me propose de prendre le volant. Même si c’est avec une certaine appréhension, j’accepte de relever le défi. Les premiers kilomètres se font à vitesse raisonnable, histoire d’éviter de me faire surprendre. Au fur et à mesure, je prends la mesure de la monture et commence à accélérer un peu. La Gran Turismo fait preuve d’une capacité impressionnante à accélérer. Non pas avec brutalité comme une Mustang GT (lire notre essai ici), mais sans jamais s’arrêter. La boite longue doit y être pour beaucoup, mais l’allonge du moteur d’origine Ferrari est telle que la poussée semble ne jamais s’arrêter.
Même si son fonctionnement en mode automatique est globalement sans reproche, je ne résiste pas à l’envie de jouer avec les palettes pour pousser un peu la boite dans ses derniers retranchements. Là encore c’est une réussite. Les vitesses s’enclenchent à la demande à la montée comme à la descente, sans temps mort mais sans à-coups inutile non plus. Une fois de plus la météo n’est pas idéale pour véritablement arsouiller, alors je me contente d’une conduite coulée (c’est le terme…) mais dynamique. Les enchaînements de virage se passent sans aucun stress, le châssis restant en toute occasion prévenant et docile. Si j’ai gardé tout au long de l’essai une grande marge de manœuvre, je reste encore impressionné par le fait de ne m’être jamais fait surprendre par un quelconque manque de motricité ou d’adhérence. Et pourtant la puissance du moteur, associée au poids conséquent de la bête, me semblaient bien intimidant au début de la journée.
Le prix de l’exclusivité :
Si les qualités intrinsèques de la Maserati semblent évidentes, la question financière se pose malgré tout. A l’heure d’écrire ces lignes, il semblerait que le tarif d’une Gran Turismo de plus de 100 000km tourne aux environs de 40 000€. Une somme qui vous pose en compétition direct avec des modèles neufs bien moins prestigieux ou performants. Par ailleurs le tarif d’entretien, un élément peut-être plus important encore que le prix d’achat, semble raisonnable. Moins de 2000€ pour 10 000 km annuels, pneus et freins compris. La Maserati reste donc un plaisir relativement raisonnable pour une voiture que l’on hésite pas à utiliser de façon intensive.
Conclusion :
La Maserati Gran Turismo mérite définitivement son nom. Performante et confortable, elle sait se marier à toutes les utilisations, que ce soit en famille où en solo pour un peu de sport et le tout avec ce qui semble finalement un coût supportable. A n’en pas douter il s’agit là d’un futur classique qui méritera une place en collection, pas seulement pour sa ligne à tomber, mais aussi et surtout pour ces qualités indéniables.