Depuis l’apparition de la S3 en 1999, la marque aux anneaux a défini une nouvelle génération de berlines sportives. Un cran au dessus des GTi classiques type Golf, l’Audi offrait plus de puissance et de luxe. La RS3 dernière génération perpétue la tradition avec, en plus, un côté sauvage assez étonnant.
Comment reconnaître une RS3 débadgée d’une A3 TDi bien optionnée ? A vrai dire je dois bien avouer que j’aurais du mal à vous le dire. Le spoiler avant plus ajouré ? Les doubles sorties d’échappement ? Un Audiste confirmé pourrait certainement vous donner une multitude de détails, mais pour un béotien comme moi, c’est quasiment impossible. Et c’est bien dommage car dans l’absolu la voiture est loin d’être moche.
Certes le design Audi ne fait pas dans l’original, au-delà même du modèle, j’aurais presque du mal à vous différentier la génération dont il s’agit. Et pourtant il y a des nouveautés sur cette RS3, ne serais-ce que les phares à LED. Mais on est friand de ce genre de détail ou on ne l’est pas. Et clairement je me range sans aucune honte dans la seconde catégorie.
Sur le modèle qui nous est confié par Audi France, la teinte spéciale gris Nardo fait quand même ressortir la voiture dans la circulation. Est-ce un bien ? Les avis divergent (et c’est beaucoup). Il est intéressant de noter que les fans de la marque ont tendance à adorer tandis que les autres sont beaucoup plus partagés, pour ne pas dire réticents. Aussi ais-je entendu un « t’avais pas l’argent pour passer une couche de peinture, t’as laissé l’apprêt ? ». Ceci dit laissez-moi quand même vous donner mon avis. C’est… spécial. En fait pour un week-end ça me va bien, mais si je devais lâcher les un peu plus de soixante dix mille euros pour me payer une RS3 (malus écologique compris), je la prendrais plutôt bleu Sepang.
Une fois la porte ouverte pas de dépaysement non plus. Le tableau de bord est typique de la marque, ce qui en soit n’est pas une critique, loin s’en faut. Heureusement le joli volant en cuir-Alcantara avec méplat et les sièges spécifiques apportent une touche d’exclusivité et de sportivité bienvenue. Le réglage de l’assise apporte cependant une première surprise : tout est manuel, ce qui surprend à ce niveau de prix, mais le plus gênant est qu’il apparaît limité de baisser le siège autant que j’aime le faire. Il en résulte une position de conduite bizarrement haute pour une sportive. Qu’à cela ne tienne, les sièges sont cependant bien confortables et offrent un maintien suffisant pour l’utilisation que j’aurais de la voiture.
Autant la RS3 semble sage à l’arrêt, autant elle change de visage dès que le 5 cylindres prend vie. Bien aidé par un échappement fortement libéré, il a le don de réveiller tout le quartier quand vous décidez de partir à 6h30 de votre résidence pavillonnaire. Heureusement que la majorité de mes voisins aiment les autos, sinon j’aurais eu des jets d’œuf sur ma porte lundi soir…
C’est sympa un moteur qui grogne. S’il se réveille façon rugissement, il s’avère tout de même relativement (et je dis bien relativement…) discret en mode « comfort ». On sent bien qu’il ne s’agit plus là de la TDi de base mais d’une mécanique de race. Dès l’huile à température, enfin je le suppose car je n’ai pas réussi à trouver de thermomètre sur le tableau de bord, je repasse en mode « dynamic » pour profiter à plein des vocalises du moulin.
Comme la Mercedes CLA 45 AMG, les passages de vitesses sont ponctués par un coup de fusil évocateur, tandis que lors des rétrogadages, l’échappement se la joue mitraillette. La période ne s’y prête certes pas, mais c’est sympa quand même. Seul regret, le manque de brutalité de ce moteur. Entendons-nous bien : il pousse fort, les chiffres en attestent. De plus la sensation d’accélération est bien présente lorsqu’on met le pied dedans. Mais la boite S-tronic tend à lisser la force du moteur.
Lors d’un démarrage au feu ou au péage par exemple, je suis persuadé que sur les deux premiers mètres, une citadine lambda pourrait être plus vive tant le démarrage se fait en douceur. Ce n’est qu’une fois l’embrayage bien collé que la voiture s’arrache, laissant tout le monde loin derrière. Il existe peut-être un launch-control quelque part dans la brochure, mais d’une part ce dispositif a tendance habituellement à raccourcir la durée de vie de la mécanique, ensuite ce n’est pas en deux jours que j’ai eu le temps de faire le tour des multiples et complexes fonctions électroniques proposées par l’auto.
Ainsi, alors que les performances sont clairement un cran au dessus des GTi telles la 308, la Focus ST ou la Megane RS, au final sur la route la différence de puissance ne se ressent pas de façon fondamentale. Sur cet aspect, malgré elle aussi une boite automatique, la Mercedes CLA 45 AMG m’avait laissé un souvenir plus vivace.
La boite, revenons-y encore. En utilisation normale elle est tout bonnement parfaite. Douce, intelligente, réactive. Rien à lui reprocher. En mode arsouille par contre, elle avoue encore quelques limites. Rien de véritablement pénalisant, juste le fait que pour un irréductible de la boite mécanique, j’ai toujours du mal à m’y retrouver. Par exemple sur une accélération en ligne droite, mode manuel enclenché. Il n’est pas rare que, vivacité des montées en régime aidant, je souhaite passer la vitesse supérieure juste avant la zone rouge vers 6500 trs/min. mais de façon préventive la boite aura enclenché le rapport supérieur vers 6200 trs. Résultat me voilà en train d’enclencher un rapport de trop. Autre exemple sur un freinage appuyé. Alors que j’aimerai profiter d’un frein moteur digne de ce nom, la boite ne m’autorise à rentrer un rapport que bien trop tard, vers 3000 ou 4000 trs/min en cible.
Moralité : la boite S-tronic c’est comme ma femme : elle a sa façon de faire, différente de la mienne. Pas forcément pire. Mais si j’essaye de faire les choses à ma façon, de toute façon ça ne lui plaira pas alors autant le faire de la sienne.
Heureusement le plaisir de conduire n’est pas uniquement guidé par la mécanique. Et de ce côté la RS3 constitue une agréable surprise. Plus proche du côté joueur de la S1 que du comportement pataud du RSQ3. S’il parait difficile de mettre l’Audi en franche glisse des quatre roues sur route ouverte, la RS3 reste cependant assez mobile pour enrouler les virages avec une certaines légèreté du train arrière. On est loin du drift, mais un lever de pied en courbe permet de resserrer la trajectoire et c’est déjà plaisant.
Lors de mon essai dynamique sur les routes de Normandie, j’ai pu profiter d’une météo plus que clémente et sur mon parcours idéal la RS3 enchaînait les mises en vitesse vertigineuses, les freinages puissants, prises de cordes précises et ré-accélérations efficaces (même ESP débranché). Au global une neutralité plaisante du fait de la précision du train avant autant que de la légèreté ressentie du train arrière, dans le bon sens du terme. Pour reprendre les comparatifs avec la 308 GTi, l’allemande se montre vive là où la française est trop rivée au sol. Le monde à l’envers…
Cependant il m’a semblé ressentir une légère faiblesse dans les freins après une dizaine de kilomètres de conduite sportive. Attention aux sorties circuit qui risquent de mettre à mal plaquettes et liquide.
Trêves cependant de comparaisons hasardeuses. La RS3 ne peut se comparer aux sportives des constructeurs généralistes. Ni en terme de tarif, ni en terme de puissance offerte. Revenons-en donc à ses véritables rivales, et particulièrement à la Mercedes CLA 45 AMG. Toutes deux sont équipées de moteurs rageurs et volubiles. Si l’Audi l’emporte sur la musicalité pure (1 cylindre en plus qui fait la différence), la Mercedes semble bénéficier d’une plus grande brutalité à la demande.
En terme de design, sauf à être adorateur de l’Audi, il faut bien avouer que la Mercedes est à la fois plus originale, plus expressive et moins facile à confondre avec la voiture de votre voisin.
La RS3 se rattrape au niveau châssis. Là où la Mercedes est neutre et implique peu son pilote, l’Audi est bien plus agréable à mener sur une route de campagne.
Si je devais choisir l’une des deux, ce serait (à mon grand étonnement)… la RS3. J’entends déjà mes amis se gausser de moi, ex-pourfendeur de la marque aux anneaux. Mais il faut se rendre à l’évidence : si je préfère le design de la CLA 45 AMG, le comportement de la RS3 est bien plus agréable au quotidien, quand arrivent ces quelques virages qui ont la capacité de vous donner le sourire pour la journée. Pour peu qu’ils soient négociés au volant d’une voiture qui vous assimile à un pilote quelques pour quelques centaines de mètres.
L’Audi RS3 ne donne pas le frisson au premier regard. Au second non plus d’ailleurs. Mais malgré quelques défauts, elle sait apporter à son pilote un véritable plaisir de conduire qui ne se limite pas à accélérer en ligne droite. Plaisir des oreilles, des accélérations mais aussi et surtout d’avoir un châssis sain, efficace et vivant. Le tout dans une auto aux qualités familiales véritables.