Aujourd’hui, le choix d’un véhicule sportif est assez fastidieux. Le prix des sportives électriques dissuade le plus souvent, et il faut ajouter du côté des thermiques un malus écologique dissuasif ⏤ à moins de passer par de l’occasion mais pas toujours récente. Avec l’Abarth 600e, le préparateur sportif de Fiat, le constructeur ose une voiture qui veut autant offrir un comportement joueur que des performances dignes d’une thermique. C’est ce que nous sommes allés vérifier sur la piste Alfa Romeo, sur le circuit de Balocco plus précisément, centre d’essais des nouveautés du groupe Stellantis.
Avouons-le : un SUV n’a rien de sportif et une voiture électrique ne semble pas plus sportive. Alors, un SUV électrique sportif, bonjour l’angoisse ! Pourtant, c’est le pari que souhaite relever Abarth, le petit préparateur italien propriété de Stellantis et auparavant de FCA ⏤ Fiat Chrysler Automotive ⏤ fondée par l’autrichien Carlo Abarth en 1949. Aujourd’hui, la gamme est réduite à peau de chagrin avec uniquement l’Abarth 500e et ses « ridicules » 155 chevaux qui n’ont plus grand chose de sportif (lire ici). Voilà que débarque un second modèle piqué par le scorpion : la sage Fiat 600. En 2024, Abarth a 75 ans (eh oui, déjà !). Historiquement, les transformations du scorpion ont touché l’Autobianchi A112, la Fiat 500 mais aussi la 600, et sans oublier les nombreuses voitures en compétition.
Alors que le secteur automobile est en pleine transformation voire mutation avec le passage à l’électrification des gammes, Abarth a changé son modèle. Depuis l’arrêt des 695 (lire ici) et 595 (lire notre essai ici) à moteur thermique, seule existe une offre électrique qui est loin de convaincre avec la 500e. Place désormais à la 600e qui introduit de nouveauté chez le scorpion : c’est la première 5 portes de série et surtout la plus puissante jamais produite. Du bloc électrique de la Peugeot 208 (et sa capacité de 54 kWh bruts), l’Abarth 600e propose deux versions : la Turismo et ses 240 chevaux, mais surtout la Scorpionissima qui établit un record de puissance pour le petit constructeur avec 280 chevaux. La motorisation n’est pas inédite puisqu’on la connaît déjà sur l’Alfa Romeo Junior Veloce (lire notre essai ici) et un peu plus tard sur la future Lancia Ypsilon HF, attendue en 2025. Les équipes d’Abarth et de Stellantis Motorsport se sont donc concertées autour d’un nouveau projet fort amusant avec la plateforme eCMP, devenue pour l’occasion eCMP Pro. Les trains ont été revus (30 mm à l’avant et 25 mm à l’arrière supplémentaires), le système de freinage également avec des disques avant de 380 mm (tandis qu’à l’arrière on retrouve ceux de la Fiat 600). Beaucoup d’efforts ont été réalisés afin de différencier la Fiat 600 mais aussi et surtout le cousin milanais, le Junior.
Du côté du design, c’est aussi l’occasion de faire le lien entre le passé et le futur de la marque. De nombreux clins d’œil au passé d’Abarth sont présents tout en apportant des éléments beaucoup plus futuristes. En premier lieu, les bas de caisse avant et arrière puisent l’inspiration au travers du radiateur de la Fiat-Abarth 600 ⏤ la fameuse Abarth 850 TC ⏤, et des éléments plus futuristes avec un design dit fractal (les diagonales que l’on retrouve un peu partout sur la voiture), inspiré quant à lui par le monde des jeux vidéo. Ces éléments permettent de mettre en avant un nez de requin pour la partie supérieure de la voiture. Le diffuseur avant a tout de même pour rôle de refroidir le pack de batterie afin de conserver les performances de la voiture. Autre élément du design, les jantes clins d’œil à la compétition et l’imposant aileron à l’arrière de la voiture. On reconnait l’Abarth 600e à ses pare-chocs, ses jantes spécifiques, ses deux teintes toujours très spécifiques ⏤ un vert Acide et un violet Hypnotique ⏤ ainsi que son aileron. Pour le reste, rien en permettra de la distinguer des autres Fiat 600 au niveau du profil.
À bord, les changements sont quant à eux… inexistants. La Turismo reprend des sièges avant baquet avec des touches de vert acide, identique à ce que l’on retrouve sur le volant Abarth spécifique et… une profusion de noir brillant (vous savez, celui qui laisse des traces de doigts partout…). L’assemblage est bon mais les matériaux font plutôt cheap. L’atmosphère est totalement différente avec la Scorpionissima qui opte quant à elle pour des teintes mates, plus flatteuses et là encore des touches de vert Acide. On gagne surtout un couvercle sur le rangement central signé Abarth, absent de la Turismo. La sellerie est signée Sabelt comme chez son cousin Junior et est d’un maintien extraordinaire avec un savant mix entre confort et sportivité dès que l’on poussera la 600e. À l’arrière, l’espace est un peu plus compté pour les grands gabarits comme le mien, notamment une fois le siège conducteur réglé pour moi. Les sièges sont assez épais, expliquant surement l’espace plus restreint pour les jambes. Pour le reste, la voiture se montre du même acabit que la Fiat 600.
Assez discuté de l’Abarth 600e car si vous cliquez sur l’essai, ce n’est pas pour une présentation des plastiques mais bien des performances de la voiture ! Pour l’occasion, Abarth a réservé les deux pistes principales du circuit pour nous démontrer que le SUV à pile fait aussi bien que les anciennes Abarth carburant au sans-plomb. Dès les premiers tours de roues, un son artificiel se fait entendre sans être excitant ; mais laissons-lui une chance. En revanche, lors de notre arrivée sur la piste, c’est la sensation de poussée du moteur électrique qui propulse la voiture. Les 280 chevaux sont disponibles de suite et la direction est ultra précise. Cette dernière se permet même d’être très légère, allant vraiment là où l’on souhaite. On commence très vite à s’amuser avec et à se sentir grisé par les performances qui sont bel et bien au rendez-vous. À la moindre accélération, on se retrouve au fond de son siège ⏤ l’Abarth 600e est un vrai jouet. On est forcé de reconnaître que les équipes d’Abarth ont vraiment cherché à rendre la voiture la plus performante possible avec un 0 à 100km/h expédié en 5,85 secondes (c’est presque 2 secondes de mieux que l’Abarth 500e).
Dans les courbes, l’Abarth 600e reste collée au bitume et se permet par moment de nous offrir des sensations « à l’ancienne » avec le train arrière qui chasse. Heureusement, le différentiel mécanique à glissement limité Torsen JTEKT vieille tout de même au grain et assure des moments amusants derrière le volant. Si le sol est légèrement humide, la voiture glisse et on a envie que ce tour de manège ne se termine pas. Les virages et autres courbes sont un régal à passer avec le SUV sportif. Tous les ingrédients sont réunis pour montrer que l’Abarth 600e est très bien née. Sur la seconde piste, nous allons effectuer des pointes de vitesse. Bien que la Turismo soit limitée à 180 km/h, la Scorpionissima permet quant à elle d’aller jusqu’à 200 km/h en vitesse de pointe. Avec ses différents modes de conduite, l’italienne se transforme. Au choix, Turismo (ou Scorpionissima), Scorpion Street et Scorpion Track. Le mode Turismo libère 150 chevaux pour 300 Nm, avec une V/max à 150 km/h et le Scorpionissima est identique mais avec 190 chevaux. Le mode Scorpion Street débloque 204 chevaux pour la Turismo et 232 chevaux pour la Scorpionissima avec une V/max à 180 km/h et un couple de 345 Nm. Le mode Scorpion Track, quant à lui, devient plus animal avec des réglages jugés plus amusants par la marque : c’est ici qu’on profite des 240 ou 280 chevaux et des 345 Nm avec les V/max les plus folles ⏤ respectivement 180 et 200 km/h. Pour la première piste, c’est donc en Scorpion Street que nous avons découvert l’Abarth mais pour la seconde partie de notre essai, c’est avec le Scorpion Track que nous nous sommes amusés.
La puissance se libère encore plus vite et la voiture fonce, et même dans les courbes, la voiture s’accroche et on en redemande. L’autonomie fond certes comme neige au soleil, mais qu’importe, ce n’est pas moi qui devra aller la recharger. La voiture est pimentée et la pointe des 200 km/h est rapidement atteinte. À partir de 180 km/h, des bruits d’airs se font sentir mais on conduit là pour le plaisir puisque dans la vraie vie, on n’atteindra jamais de telles performances. La voiture est rivée à la route et se montre mine de rien très confortable. Chose « amusante » lors des sorties de virage, le train avant supporte très bien la puissance du bloc et semble perdre pied dès qu’on tourne le volant, partant tout droit du coup. Un seul point noir fait son apparition sur ce tableau qui me donne l’envie de profiter de la voiture dans la vie de tous les jours : les freins. Certes, on bénéficie de freins avant très puissants, mais on sent que la pédale est trop « molle » ⏤ surement un réglage de la Fiat 600e qui est plus sage que la vilaine Abarth. Dommage, car avec une autonomie discutable, l’Abarth 600e pâtit selon moi d’une économie regrettable d’autant qu’on ne se sent pas rassuré par la pédale lorsqu’on freine. Toutefois, le mode Brake devrait un peu pallier à cela.
On arrive au terme de cette prise en main très amusante. L’Abarth 600e est bien née, et il semblerait que l’électrique peut très bien prendre la suite de nos si regrettées GTI thermiques ⏤ peut-être pas pour tout le monde, j’en conviens. Abarth a surtout cherché à rendre la voiture la plus performance possible quitte à perdre un peu d’autonomie. Avec seulement 340 kms proposés pour une charge, l’Abarth 600e déçoit un peu mais n’étonne pas. Ne me demandez pas la consommation en kWh car sur ce type de voiture, on s’en moque un peu (bon, j’ai tout de même relevé une moyenne à 33 kWh, c’est énorme mais elle a fait du circuit). L’Abarth 600e est une voiture a découvrir malgré des tarifs un peu élevés mais moins gourmands que l’Alfa Junior Veloce avec un ticket d’entrée à 44 990 € et le pack Scorpionissima à 4000 €. Les deux versions ont donc le droit (pour l’instant) au bonus écologique de 4000 €. Je ne suis pas un grand amateur de la fée électrique dans l’automobile mais je dois reconnaître qu’Abarth nous livre un biscuit sucré électrique délicieux, qui pose les bases de voitures sportives électriques au bon goût de GTI thermique.
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