Pour fêter son 50e anniversaire, le Club Delahaye a eu la bonne idée d’organiser, à Epoqu’Auto, une rétrospective consacrée à l’une des marques les plus mythiques de l’histoire automobile française, créée par Emile Delahaye. « Il n’y a en fait qu’un seul Club Delahaye dans le monde, avec certes des adhérents dans le monde entier, mais un seul club quand même, nous sommes licenciés de la marque » déclare Jean-Paul Tissot, Président du Club Delahaye. Pour les 250 membres, dont 85 % sont installés en France – les autres habitant essentiellement aux États-Unis -, cet événement sera aussi l’occasion de revivre une histoire qui prend son envol à Tours, en 1894.
Delahaye, des moteurs français
C’est en effet sur les bords de la Loire qu’Emile Delahaye fait ses premières automobiles. Mieux encore, c’est dans la capitale de la Touraine que la première voiture 100 % française voit le jour. Alors que les Peugeot et autres Panhard & Levassor utilisaient des moteurs allemands Daimler, le constructeur tourangeau conçoit lui même son moteur. Une particularité que ne remettent pas en cause Léon Desmarais et Georges Morane, deux industriels parisiens, qui reprennent l’affaire en 1898. Les nouveaux dirigeants rapatrient en revanche la production sur Paris et investissent les moyens nécessaires pour assurer le développement de la marque.
« Delahaye ne fabriquait en revanche que les châssis et les moteurs », précise Jean-Paul Tissot. « Une fois la voiture terminée, les clients en prenaient possession et la confiaient aux grands carrossiers de l’époque pour disposer de leur propre modèle. Les plus grands noms de la carrosserie française ont travaillé pour Delahaye. La plupart d’entre eux adoraient intervenir sur une Delahaye, car le châssis 135, emblématique de la marque, se prêtait idéalement à leur travail en raison de ses proportions. » Moins coûteux qu’un châssis Bugatti ou Hispano Suiza, le châssis Delahaye autorisait les propriétaires à engager des investissements importants sur la carrosserie. L’engouement pour Delahaye aux États-Unis repose d’ailleurs sur cette particularité. « Les américains sont très friands de ces carrosseries et cela se répercute aujourd’hui sur la cote des voitures. On se retrouve avec des valeurs tout à fait hallucinantes et beaucoup des Delahaye qui se vendent aujourd’hui partent aux États-Unis. »
La révolution du châssis 135
Si la patte des grands carrossiers français a largement contribué à la notoriété des Delahaye, c’est malgré tout ce fameux châssis 135 qui constitue le cœur de la machine et qui est au départ de l’aventure. Comme son nom l’indique, ce châssis, devenu légendaire, apparaît à l’occasion du salon de 1935. Avant cette véritable révolution dans son histoire, Delahaye a l’image d’une marque sérieuse, solide, mais dont la notoriété reste limitée. Jusqu’en 1914, elle produit une grande variété de châssis en taille et en puissance, afin de répondre à la demande du plus large panel d’acheteurs potentiels. « Cela allait des monocylindres jusqu’à des voitures de grand luxe développant 60 CV fiscaux. Le roi d’Espagne Alfonse XIII, par exemple, achetait ses châssis chez Delahaye et faisait ensuite carrosser ses voitures par Labourdette », précise Jean-Paul Tissot.
Au lendemain de la première guerre mondiale, Delahaye se cantonne dans le milieu de gamme. Un positionnement qui est finalement abandonné à partir de 1935 avec la sortie du châssis 135. Le constructeur français proposera, certes, des modèles inférieurs au catalogue, mais le cœur de sa production a bel et bien basculé vers le 135. Désormais c’est lui qui assure la notoriété et le succès de la marque. Cette arrivée du 135 est en quelque sorte la petite étincelle qui fait décoller l’ensemble. Delahaye se lance dans la compétition automobile et les succès ne tardent pas. Les victoires au Monte Carlo en 1937 et aux 24 heures du Mans en 1938 résonnent comme autant de plaidoiries en faveur de la marque française. « D’autant que c’est ce même châssis 135 qui équipait les voitures engagées dans ces courses et celles qui participaient aux concours d’élégance. C’était vraiment la voiture parfaite », estime Jean-Paul Tissot. « Son slogan “l’élégance sportive” reflétait exactement ce qu’elle était en réalité. »
Fin de l’aventure
La seconde guerre mondiale va pourtant venir briser cet élan. Car au lendemain de la victoire des alliés, la situation a totalement changé. Delahaye continue de produire le 135 et tentent même de sortir un modèle avec un moteur un peu plus musclé et trois empattements, les châssis 175-178-180, pour attaquer le marché des États-Unis. Une tentative vaine. Car la concurrence des voitures anglaises, mais aussi l’apparition de Ferrari, dès 1947, bouleverse la donne en profondeur. « Ceux qui voulaient acheter des voitures sportives se tournaient vers Jaguar, vers Ferrari, des voitures plus modernes et moins coûteuses. »
Delahaye tente une dernière manœuvre au salon de 1951, avec la sortie du châssis 235. Il ne sera finalement produit qu’à 85 exemplaires, dont beaucoup seront carrossés par Henri Chapron. En dépit de son moteur légèrement plus poussé, il ne supporte pas la concurrence avec les nouvelles reines du bitume. Trois ans plus tard, la marque est absorbée par Hotchkiss et Delahaye quitte définitivement la route, laissant derrière elle une légende que les passionnés ne se lassent pas de raconter. Si l’on retient l’intégralité de la production de Delahaye, de 1894 à 1954, quelque 90000 véhicules seront sortis de l’usine. Un volume que l’on ne peut certes pas qualifier de confidentiel, mais qui n’est en rien comparable aux chiffres des grandes constructeurs comme Renault ou Peugeot.
Le plateau proposé à Epoqu’Auto réunira une présentation très large de la production Delahaye. Jean-Paul Tissot et ses amis n’ont pas voulu se limiter au châssis 135, avec vingtaine de Delahaye. On retrouvera ainsi la Delahaye Type 1 de 1896, qui est prêtée par le musée de Chatellerault. Elle constituera le point de départ d’une exposition qui racontera l’histoire de la marque à travers ses véhicules, de l’utilitaire au camion de pompier, en passant par la Jeep Delahaye. Enfin, le Musée de Mulhouse nous a prêté deux formidables voitures qui ont marqué leur époque : La 16/20HP 1912 coupé landaulet, avec son moteur 4 cylindres, et la 135M, coach Antem de 1949.
• BREAK TYPE 1 – 1896
• TYPE 32
• TYPE 64
• TYPE 87
• UTILITAIRE DELAHAYE
• CAMION DE POMPIER DELAHAYE
• TYPE 134
• TYPE 135
• TYPE 148 L CABRIOLET GUILLORÉ (1950) ayant appartenue au Maréchal de Lattre de Tassigny
• BERLINE BLINDÉE TYPE 180
• TYPE 235
• VLR (Véhicule Léger de Reconnaissance)
• 16/20HP 1912 coupé landaulet
• 135M coach Antem de 1949
Epoqu’Auto 2016, c’est à Lyon du 4 au 6 novembre, à Eurexpo. Plus d’infos sur http://epoquauto.com/
Source CP Epoqu’Auto