L’année dernière, Gordon Murray Automotive (GMA) a annoncé les détails de son projet de créer une supercar aussi légère qu’axée sur le conducteur. Cet objectif aussi élevé exigeait de nouvelles innovations ainsi que l’abandon de la tendance actuelle des supercars : toujours plus de puissance, de vitesse et inévitablement de poids.
« Une voiture lourde ne peut jamais offrir les attributs dynamiques d’une voiture plus légère. L’éthique du rapport poids/puissance façonne les performances et la maniabilité. » explique Gordon Murray dont la T.50 (lire ici) est un tiers plus légère que la masse moyenne d’une supercar actuelle, d’environ 1436 kg (calcul via le top 10 des meilleurs supercars 2020 d’Autocar). Et l’homme sait de quoi il parle, puisqu’il est l’un des pères de la McLaren F1 (lire ici) accusant 1140 kg (DIN) sur la balance, soit 37 kg de plus que l’Alpine A110 Première Edition (lire ici) dont Gordon Murray s’est porté acquéreur d’un exemplaire !
Si la McLaren F1 était motorisée par un V12 6.0L atmo BMW de 627 ch et 652 Nm, la T.50 sera propulsée par un V12 4.0L atmo ouvert à 65° offrant une puissance de 663 ch (654 hp) à 11 500 tr/min et un couple de 467 Nm (345 lb-ft) à 9 000 tr/min. 71% du couple est disponible dès 2 500 tr/min, soit 331 Nm. Le régime maxi atteint 12 100 tr/min ! Cela donne au V12 de la T.50 un rapport puissance/litre de 166 ch/litre, ce qui est une amélioration par rapport aux 154 ch/litre de l’Aston Martin Valkyrie (V12 6.5L atmo, 1 176 ch à 10 500 tr/min [1 014 ch thermique + 162 ch électrique], 900 Nm à 7 000 tr/min [740 Nm thermique + 280 Nm électrique], régime maxi 11 100 tr/min). Plus étonnant, le temps de réaction du moteur est trois fois plus rapide que le V12 BMW S70/2 de la McLaren F1. Pour ce faire, les pièces mobiles internes sont allégées autant que possible, le vilebrequin en acier ne pèse que 13 kg, les bielles et les soupapes sont en titane, afin de réduire les masses de rotation, favorisant ces hauts régimes et le temps de réaction que Gordon Murray voulait atteindre.
La cylindrée cube 3994 cm3 avec un alésage 81,5 mm et une course 63,8 mm. Le taux de compression est fixé à 14: 1. Il n’y a pas de courroies sur le V12 de la T.50, seulement des chaînes. Cette pièce de choix, développée conjointement par Cosworth-GMA, est micro-hybridée à 48V et dotée d’un démarreur et d’un générateur intégrés. Cet ensemble électrique apporte 49 ch supplémentaires en mode “groupe motopropulseur VMax”. Gordon Murray a également conçu tous les accessoires du V12 pour qu’ils soient situés hors de la vue, ne rendant que les collecteurs d’échappement et les tubulures d’admission visibles depuis le capot moteur vitré.
Pour réaliser l’exploit technique d’arriver à 980 kg à sec, l’équipe a choisi de ne pas présenter un véhicule dépouillé, mais de livrer aux propriétaires une voiture « confortable et pratique au quotidien » où « chaque composant compte ». Commentant son approche de la légèreté, le professeur Murray déclare : « La conception d’une voiture de sport légère ne vient pas uniquement de la spécification de matériaux exotiques, elle provient d’un état d’esprit, d’une concentration et d’un contrôle absolus, d’une compréhension profonde de la conception de légèreté optimisée. »
Rapport poids/puissance et non pas la puissance d’abord et le poids ensuite
L’une des principales philosophies de Gordon Murray (lire ici) est qu’il existe une énorme différence entre puissance d’abord et le poids ensuite, et sa propre perspective de conception qui considère le rapport poids/puissance d’un véhicule. Avec la T.50, chaque centaine de chevaux n’a qu’à propulser 150 kg, tandis que pour une supercar typique actuelle – en moyenne 1436 kg pour 684 ch – le poids (100 ch) à propulser est de 210 kg, soit 40% plus élevé. C’est ce calcul poids/puissance qui anime le développement de la T.50, chaque composant étant conçu et fabriqué pour atteindre le poids de départ le plus bas. Cette concentration et ce contrôle garantissent qu’aucune mesure rétrospective d’économie de poids ne doit être mise en œuvre, plus tard dans le développement de la voiture.
Pour égaler le rapport poids/puissance de 1,48 kg/ch (soit 676 ch/T) de la T.50, la supercar typique actuelle de 1436 kg aurait besoin de 300 ch supplémentaires. Bien sûr, les 970 ch nécessaires pour prétendre être équivalent à la T.50 (sur le papier) augmenteraient le coût, la complexité et nécessiteraient des composants plus gros et plus lourds (pneus, transmissions, transmission, freins, etc…) pour gérer la puissance supplémentaire.
Le poids tue les performances dynamiques
Une voiture lourde ne peut jamais offrir les attributs dynamiques d’une voiture plus légère, même si elle a le même rapport poids/puissance. Bien qu’il soit possible de masquer les capacités dynamiques d’une voiture lourde avec une suspension active complexe et une électronique sophistiquée, l’agilité, la réactivité et le plaisir de conduite d’un véhicule léger ne peuvent être égalés : « Aujourd’hui, le plaisir de conduire a été perdu car tant de supercars ne deviennent « vivantes » qu’aux limites de leurs performances. La poursuite d’une vitesse de pointe ne fait qu’ajouter du poids (notamment par le biais de moteurs toujours plus puissants), donc l’avenir des voitures véritablement performantes réside dans la perte de poids intelligente. », explique Gordon Murray.
Chaque composant compte
Avec un encombrement compact de seulement 4 380 mm (L) x 1 850 mm (l) x 1 152 mm (h), la T.50 est plus petite qu’une Porsche 911 mais offre un espace confortable pour trois passagers et bagages. Son châssis monocoque et ses panneaux de carrosserie entièrement en fibre de carbone pèsent moins de 150 kg au total. À l’intérieur, les trois sièges inspirés de la course sont également construits en fibre de carbone. Le siège conducteur positionné au centre pèse moins de 7 kg, tandis que les sièges passagers qui le bordent à l’arrière atteignent chacun un poids inférieur à 3 kg.
La T.50 est équipé d’un moteur qui grâce à des normes rigoureuses, une ingénierie innovante et l’expertise des ingénieurs de Cosworth Powertrain, pèse moins de 180 kg, 178 exactement soit 28 kg de moins que le V12 Cosworth construit pour l’Aston Martin Valkyrie (lire ici, là pour les infos techniques et ici pour la présentation). Cela en fait le V12 routier le plus léger jamais fabriqué, soit 60 kg plus léger que le BMW (S70/2) de la McLaren F1, tout en générant plus de puissance (663 ch vs 627 ch).
Pour minimiser le poids à chaque étape du développement, les équipes de conception et d’ingénierie surveillant le poids de chaque pièce, jusqu’aux écrous, boulons et rondelles. Une technique chère à Colin Chapman qui l’avait instituée chez Lotus et que l’on retrouve encore aujourd’hui chez McLaren. Cette méthode a connu d’innombrables conceptions, révisions, essais et améliorations de composants grands et petits. Sur de nombreuses voitures, ces pièces sont génériques et bien plus grandes qu’elles ne devraient l’être. Pour la T.50, le diamètre et la longueur de chaque fixation (environ 900 au total) ont été optimisés en calculant les forces auxquelles chacun serait exposé.
Pour l’équipe de Gordon Murray Automotive, aucune économie de poids n’est considérée comme négligeable. Par exemple, le pédalier est 300 gr plus léger que le F1 et le vitrage est 28% plus fin que d’habitude tout en restant un composant structurel solide. Pour toute l’équipe, leur objectif de légèreté est inébranlable, chaque innovation, test et révision sont guidés pour offrir la supercar la plus pure, la plus légère et la plus axée sur le conducteur et le plaisir de conduite.
Source CP GMA – article mis à jour le 21 juillet 2020