La 917-001, restaurée par Porsche pour son cinquantenaire (lire notre article ici), a profité de son passage à Goodwood au 77 MM (lire notre article ici) pour poser avec une autre légende, de l’aviation cette fois ci, le Concorde qui fête le 50ème anniversaire du premier vol britannique, le 9 avril 1969. Le vainqueur des 24 Heures du Mans en 1970 sur Porsche 917, Richard Attwood a rencontré à cette occasion le capitaine Tim Orchard, commandant de bord sur Concorde, détenteur du record pour la traversée transatlantique New York/Londres, en 2 heures et 52 minutes.
Il y a exactement 50 ans, le second prototype du Concorde, avion civil supersonique franco-britanique, effectuait son vol inaugural au départ de Filton Airfield, à Bristol, en Angleterre. Le prototype 002 G-BSST (Great-Britain Super Sonic Transport) allait réaliser 438 vols, pour des tests destinés, à cette époque, à battre de nouveaux records de vitesse. Objectif : obtenir une vitesse de croisière de 2179 km/h soit Mach 2,02. Concorde sera notamment certifié pour une VMax de 2405 km/h soit Mach 2,23, une altitude opérationnelle de 18 290 m (maxi 20 025 m), une autonomie de 6 200 km, une vitesse ascensionnelle de 25,41 m/sec ! L’aboutissement du projet franco-britannique Concorde est avant tout une aventure culturelle et managériale, au delà des défis technologiques et de la barrière linguistique. Pour exemple, lors d’une des nombreuses réunions de suivi de projet, un ingénieur anglais a tout de même déclaré : “Les mesures en pieds sont plus précises que celles en mètre !”… Ambiance. Finalement, le système métrique sera adopté.
De même, il aura fallut des trésors de diplomatie aux (hommes et femmes) politiques des deux pays pour mener le projet à son terme. Ainsi, Charles de Gaulle, président français, suggéra en janvier 1963 que l’avion soit baptisé “Concorde” et le 24 octobre, une première maquette grandeur nature du “Concord” sans “e” fut présentée. S’ensuivit une polémique sur le nom de l’avion. Le ministre britannique de la Technologie, Tony Benn, siffla la fin de la récré en disant : “Le Concord britannique s’écrira désormais avec un “e” car cette lettre signifie aussi Excellence, England, Europe et Entente !” Aujourd’hui, à l’heure d’un probable futur BrExit, ces mots résonnent comme un coup de tonnerre. Pour autant, Sud-Aviation et British Aircraft Corporation (BAC) se sont répartit équitablement les développements, en se complétant mutuellement. Le “moteur” est un turboréacteur, au nombre de 4 unités réparties en duo de chaque côté, sous l’aile Delta. L’Olympus 593, d’origine BAC puis Rolls Royce/Snecma, est dérivé de celui d’un bombardier, le Avro 698 Vulcan B.2, d’où son bruit au décollage et en post combustion, nuisances sonores ayant limitées les survols des habitations en mode supersonique. Chacun développe une poussée unitaire de 169,3 kN soit au total 677 kN. Au décollage, les 4 Olympus 593 développent 70 T de poussée total soit environ 160 000 ch !
Le Concorde est un “petit” avion civil de transport. Ses dimensions sont menues : longueur 62,19 m, envergure 25,60 m, hauteur 12,19 m, aire alaire 358,251 m2. Sa charge alaire maxi est de 488 kg/m2, sa masse à vide de 79,3 T, au décollage 185 T (dont 119500 l de kérosène), à l’atterrissage 111,13 T. 100 sièges sont occupés par des passagers en version commerciale. Défis technologique à plus d’un titre, nécessitant de nouveaux matériaux (composites) : le Concorde inaugure les commandes de vol électriques analogiques (fly by wire), des turboréacteurs avec mode post combustion (vitesse au décollage 400 km/h), des entrées d’air subsoniques même en mode supersonique (!), un allongement du fuselage en mode supersonique, un nez basculant à verrière intégrée, un pilote automatique gérant automatiquement la puissance, un système de freinage électrique avec disques ventilés en carbone (vitesse d’atterrissage 360 km/h et pas d’aérofreins !), un rééquilibrage des masses en vol via une répartition du kérosène dans les différents réservoirs, etc… Le Concorde fut un véritable laboratoire de solutions technologiques utilisées aujourd’hui par toute l’aviation civile. 20 exemplaires seront construits en tout.
Le même mois, la toute première Porsche 917 – châssis 001 – commença son développement et devint la machine de course d’endurance la plus emblématique et la plus prospère de son époque. Créée par une petite équipe d’ingénieurs audacieux et inventifs, la 917 a fait un pas important en termes d’aérodynamique, de groupe motopropulseur (12 cylindres) à la fois puissant et l’utilisation de matériaux jusque-là exclusivement réservés à… l’aviation. C’est donc au musée de la marine royale, à Yeovilton, sur la côte sud de l’Angleterre, que la Porsche 917-001 a retrouvé le Concorde Alpha-Foxtrot G-BOAF. Qui connait mieux ces deux machines que Tim Orchard et Richard Attwood ?
“C’était fascinant de montrer la 917, une voiture de l’époque de Concorde et, à mon sens, développée avec le même dévouement et la même concentration. La brutalité de la voiture – sa simplicité – est frappante et d’après ce que j’ai entendu dire, c’était une machine formidable à conduire. En même temps, c’était un plaisir de montrer à Richard un avion que j’ai eu la chance de piloter pendant neuf ans. Concorde était différent de tout ce que j’avais piloté auparavant ou depuis. A la fois avion de chasse à réaction et croiseur transatlantique raffiné. Ses énormes réserves de puissance et sa polyvalence étaient extraordinaires. La Porsche et le Concorde sont des bijoux apparentés, tous deux créés avec un énorme soin par une petite équipe de passionnés, mais capables de performances inégalées à leur arrivée.” déclare le capitaine Tim Orchard enthousiaste.
Richard Attwood précise : “Comme beaucoup de gens, je suis un grand fan de Concorde et j’aurais aimé pouvoir voler à son bord. J’ai raté ma chance ! La 917 et la Concorde semblent si pures et simples de l’extérieur, mais toutes deux masquent une ingéniosité technique toujours aussi impressionnante au regard des normes actuelles. Je tiens à remercier Tim pour le temps et la patience dont il a fait preuve en me faisant visiter les lieux. J’ai tellement aimé me souvenir de la situation à la fin des années 60 et au début des années 70, par notre conviction que nous pourrions réaliser à peu près n’importe quoi, si nous y réfléchissions bien.”
Sources : CP Porsche et Museedelta.free.fr/concorde/